À Mbour, grand port de pêche du Sénégal, faute de ressources halieutiques suffisantes, tous les jeunes hommes ont pensé à migrer en pirogue, direction l’Espagne. Face à la multiplication des drames en mer, l’Association nationale des partenaires migrants (ANPM) accompagne les exilés rapatriés, refoulés, ou candidats au départ dans des projets de réinsertion sociale et économique tout en sensibilisant la population aux droits à la migration.
Il est 7h30. Khalifa, 27 ans, a les yeux perdus vers le large : « Tous les jeunes que vous voyez veulent partir en Europe pour aider leur famille. C’est trop dur de vivre ici. » En ce mois de mars, à Mbour, le deuxième port du Sénégal, à 80 kilomètres au sud de Dakar, les préparatifs pour la vente journalière du poisson battent leur plein. Au premier plan, une vaste plage et des centaines de Sénégalais, principalement des femmes, remplissent des bassines d’eau, affûtent des couteaux, installent des tabourets, haranguent le passant. Au second plan, d’immenses pirogues colorées posées sur le sable ou en train d’accoster.
Enfin, l’océan Atlantique à perte de vue, où l’horizon se confond avec la grisaille du large. Le jeune homme est habitué au décor et aux bruits quotidiens du grand port de pêche. « Je suis né ici, j’y ai passé la plupart de mon temps. » Il n’est pas triste, mais résigné. Ce matin comme tant d’autres, la pêche n’a pas été bonne. Quand elles rentrent au port, les pirogues sont quasiment vides. Khalifa ne gagne plus sa vie en tant que mareyeur – ce métier qui consiste à acheter le poisson aux pêcheurs pour le revendre dans tout le pays. Daurades, mérous jaunes et noirs, badèches sont en voie de disparition, comme les sardinelles, base de l’alimentation quotidienne des Sénégalais. « Il n’y a quasiment plus de poissons à cause des chalutiers russes, chinois et européens au large de nos côtes », déplore le jeune homme.