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A force de construire des barrages sur le Mékong, le Laos a gagné le surnom de batterie de l’Asie. Sylvain Ropital, chargé de mission Asie au CCFD-Terre Solidaire, nous éclaire sur les conséquences de la multiplication de ces infrastructures.
Une transformation en « batterie de l’Asie »
Le Laos est toujours perçu comme un petit pays pauvre, autoritaire, enclavé, sans accès à la mer et de fait à la merci de ses puissants voisins chinois et thaïlandais. Après la fin de la Guerre froide, le Laos perd le soutien économique de l’Union Soviétique et se retrouve rapidement au pied du mur. La Banque Mondiale se saisit de cette opportunité pour faire progressivement du Laos, la Batterie de l’Asie du Sud-Est. C’est la période de construction d’énormes barrages sur le fleuve Mékong pour exporter de l’électricité produite vers ses voisins.
Une multiplication des barrages aux effets pervers
Les grands barrages sont aujourd’hui présentés comme une source d’énergie propre, décarbonée, durable et comme une des solutions pour respecter les objectifs de l’Accord de Paris. Mais la propagation de ces barrages sur le fleuve Mékong n’est pas sans effets pervers.
Si la bétonisation du fleuve Mékong se poursuit au rythme de ces dix dernières années, la région connaîtra une série d’effets néfastes et irréversibles
Sylvain Ropital, chargé de mission Asie
Plus de 70 millions de personnes dépendent de la bonne santé du fleuve Mékong pour faire vivre leurs familles.
Si la bétonisation du fleuve se poursuit au rythme de ces dix dernières années, la région connaîtra une série d’effets néfastes et irréversibles : déforestation, extinction massive d’espèces, érosion, infertilité des sols, insécurité alimentaire, déplacement forcé et appauvrissement des communautés.
Ainsi, le Cambodge qui subit lui-même les conséquences des grands barrages s’est engagé, lors de la COP 26, à ne plus en construire sur son sol.
Le Laos Dam Investment Monitor agit pour protéger le fleuve Mékong
Notre partenaire le Laos Dam Investment Monitor (LDIM) s’est créé en 2018 en réaction à l’effondrement d’un barrage dans le sud du Laos qui a tué des dizaines de personnes et en a déplacé des milliers.
Face à l’ampleur du problème, la mobilisation citoyenne au Laos est délicate et dangereuse. C’est la raison pour laquelle, LDIM est basé en Thaïlande.
Aujourd’hui LDIM agit à deux niveaux :
- Avec des actions de plaidoyer en tentant d’influencer les choix de l’équivalent d’EDF en Thaïlande.
- Avec des actions de sensibilisation de l’opinion publique. LDIM organise chaque année la « semaine de l’environnement » qui regroupe aussi bien des experts, que des artistes, scientifiques et des membres des communautés affectées par ces projets.
LDIM travaille actuellement à l’annulation d’un projet de grand barrage à deux pas du site sacré de Luang Prabang, classé au patrimoine mondial de l’UNESCO.
Retrouvez l’interview de RCF sur le site national